Recours indemnitaire : éclaircissement du Conseil d'Etat en matière de liaison du contentieux

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2019
Recours indemnitaire : éclaircissement du Conseil d'Etat en matière de liaison du contentieux
Le retour à la liaison du contentieux en cours d'instance.

Le décret n° 2016-1480 du 2 novembre 2016 portant réforme du Code de justice administrative - dit décret JADE - a modifié l'article R. 421-1 en ces termes :

"
La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée.
Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle.".

De cette nouvelle rédaction, les praticiens en ont induit l'obligation pour le requérant de lier le contentieux avant l'introduction de son recours indemnitaire.

Cette interprétation résulte manifestement d'une incompréhension des dispositions précitées puisque le Conseil d'Etat vient la contredire par un avis rendu le 27 mars 2019, n° 426472, publié au recueil Lebon.

La section du contentieux nous apporte ainsi deux points importants.

1. En premier lieu, elle nous informe du caractère d'ordre public des dispositions de l'article R. 421-1 précitées :

" 2. Il résulte de ces dispositions qu'en l'absence d'une décision de l'administration rejetant une demande formée devant elle par le requérant ou pour son compte, une requête tendant au versement d'une somme d'argent est irrecevable et peut être rejetée pour ce motif même si, dans son mémoire en défense, l'administration n'a pas soutenu que cette requête était irrecevable, mais seulement que les conclusions du requérant n'étaient pas fondées. ".


En conséquence :

Si la partie qui a intérêt à invoquer le moyen tiré de l'absence de liaison du contentieux s'abstient de le faire, le juge est tenu de le relever d'office.

Rappelons que pour ce faire le juge doit d'une part déduire l'existence du moyen des pièces du dossier qui lui est soumis et peut, d'autre part, prescrire toute mesure d'instruction à l'effet de vérifier toute présomption quant à l'existence de ce moyen.

2. En second lieu, le Conseil d'Etat nous rappelle que la recevabilité de la requête tenant à la liaison du contentieux doit s'apprécier à la date à laquelle le juge statue :

"
3. En revanche, les termes du second alinéa de l'article R. 421-1 du code de justice administrative n'impliquent pas que la condition de recevabilité de la requête tenant à l'existence d'une décision de l'administration s'apprécie à la date de son introduction. Cette condition doit être regardée comme remplie si, à la date à laquelle le juge statue, l'administration a pris une décision, expresse ou implicite, sur une demande formée devant elle. Par suite, l'intervention d'une telle décision en cours d'instance régularise la requête, sans qu'il soit nécessaire que le requérant confirme ses conclusions et alors même que l'administration aurait auparavant opposé une fin de non-recevoir fondée sur l'absence de décision. ".

En conséquence :

Il est à nouveau possible de régulariser en cours d'instance le défaut de liaison du contentieux tenant à l'absence de décision administrative à la date d'introduction du recours à fin d'indemnisation ou de paiement d'une somme d'argent.

Le requérant peut ainsi régulariser sa requête par une demande adressée à l'administration après l'introduction de l'instance, sans qu'il ait à confirmer ses conclusions et quand bien même l'administration aurait relevé l'absence de décision à la date de l'introduction de la requête.

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